Quel est meilleur tailleur de Paris ?

 
 

Cette question, vous vous l’êtes sans doute déjà posée.
Et vous n’êtes pas les seuls, nos aïeux se posaient les mêmes questions.

Une des réponses a été donné par Claude Guilleminot et Rosine Vidart en 1967 dans leur guide des meilleures adresses de la capitale intitulé Paris Snob.

Comment classer, comment hiérarchiser ces tailleurs ? Comment dire que Cifonelli est meilleur que Portes ou que Creed ?
C’est impossible. Tant de facteurs entrent en jeu. Des facteurs qui s’appellent : conformation personnelle, manies, opinions que l’on se fait de soi-même, philosophie de l’élégance.
Mais tous les noms ci-dessus sont ceux de grands artistes…Faites votre choix.

Si Creed et Portes ont disparu, Cifonelli perdure encore aujourd’hui. Sa réputation n’a pas d’ailleurs pas faibli, preuve d’un savoir-faire solide.
A noter que Camps de Luca n’est pas cité pour la simple raison que l’atelier a été fondé en 1969, soit deux ans après la publication de ce guide.

Cifonelli, Le plus grand de tous ?

Chaussures Church vendues chez Arny’s, la “Rolls Royce des chaussures” ?

En 1967, Céline est avant tout un bottier reconnu qui fait de la femme, de l’enfant mais aussi de l’homme (rue de Rennes)

Un morceau d’Angleterre, les bonnes adresses - Old England en tête

Le rois de la chemise ?
Sulka, grand chemisier anglais de Paris

 

Caruso x Edition⎜Manteaux tailleur, costumes et Streetwear

 
 

Dans un article de l’année passée, nous avions déjà parlé de Caruso, l’un des meilleurs fabricants de pièces tailleur au monde.

La marque italienne collabore cette saison avec Edition, une marque du groupe japonais Tomorrowland. Fondé par Hiroyuki Sasaki en 1978, le groupe fabrique et distribue ses propres marques de vêtements pour femmes et hommes au Japon. On peut citer Tomorrowland, Des Prés, Galerie Vie, Souleiado et Edition.

La collection de cette capsule a été pensée de manière à pouvoir être porté avec une certaine désinvolture pour un look plus streetwear. Cela passe par l’absence de poche poitrine ou encore en allongeant la longueur des vêtements proposés.

Une preuve, s’il en était besoin, que les vêtements tailleurs peuvent très se porter dans des styles a priori opposés.

Image edition-jp.com

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Exemple similaire ci-dessous avec Josh Peskowitz - qui a travaillé pour The Fader, Esquire, GQ ou encore le New York Times - qui porte un long manteau manches raglan Drake’s fabriqué en Italie dans un tweed motif Gun Club traditionnel. Le tout assorti d’un jogging gris et des New Balance.

 

Dior, les meilleurs costumes de l'industrie ?

 
 
 

[Mise à jour, 5 mai 2021] le reportage est à nouveau disponible sur le site Arte ou via Youtube.


Reportage de Loïc Prigent sur le vêtement masculin, dont une rapide immersion dans l'atelier tailleur de Berluti.

Et comme d'habitude ne tardez pas trop, le reportage est disponible en ligne jusqu'au 5 septembre 2018.

 

 

 

Antonio Liverano - Une journée avec lui

 
 
antonio liverano florence.jpg

Ceux qui ont vu le film Colori di Antonio en ont déjà eu un aperçu. La vie d’un artisan, tailleur dans ce cas précis, nécessite un travail régulier et de longue haleine. Car on oubli souvent les heures et les heures nécessaires pour arriver à produire ces créations. On nous demande souvent combien de temps il est nécessaire pour concevoir tel ou tel costume bespoke. En général moins de 70h. Mais on oublie souvent les milliers d’heures d’expériences nécessaires en amont. Un peu comme la création de parfum. Cela peut prendre quelques heures, mais c’est sans compter les milliers d'heures à sentir des odeurs différentes pendant les 10 années précédentes.

Photo from I colori di Antonio

Photo from I colori di Antonio

 

Pour vous faire une idée de la vie d'un artisant, on a demandé à Mark Cho s'il était possible de traduire son interview menée avec Antonio Liverano. Il a bien entendu gentiment accepté.
Parce que oui, Antonio fait indéniablement parti des gens qui travaillent beaucoup et qui se lèvent tôt. Ça nous rappelle une conférence récente de Maurizio Marinella au Bon Marché (dont on publiera bientôt les passagesmarquants) qui expliquait qu’il ouvre son magasin Napolitain tous les matins à 6h30 pour pouvoir accueillir et échanger avec les clients les plus matinaux.

 

  • 5 heures du matin. Antonio se réveille, s'habille et profite d'un simple petit-déjeuner de pâtes et d'un café macchiato.
  • 6h45. Antonio part de sa maison à la campagne vers son magasin Florentin, parfois en voiture et parfois en train. Une fois qu'il est sur la route, il commence à penser au travail. Il commence par réfléchir à son entreprise dans son semble, puis en rappelant les clients individuels et leurs commandes.
  • 7h45. Antonio arrive au magasin. Il est habituellement le premier à arriver. Après avoir vérifié le magasin, il prépare les fers à repasser en les démarrant afin qu'ils soient prêts à être utiliser lorsque les autres tailleurs arriveront. C’était le premier travail d'Antonio à l'âge de 8 ans lorsqu'il a commencé l’art tailleur. À l'époque, les fers devaient avoir des morceaux de charbon chaud placés à l’intérieur. Une opération faite à la main.
  • 8h30. Antonio vérifie le travail de la veille des tailleurs. Il est toujours intimement impliqué dans tous les vêtements, en faisant constamment des contrôles de la qualité sur tout ce qui se passe dans le magasin.
  • 9h30 - 13h. Antonio passe la majeure partie de son matin à couper pour les commandes de leurs clients.
  • 13h - 14h. Déjeuner. Antonio a maintenant 78 ans. Donc parfois lorsqu’il se sent fatigué, il rentre plus tôt chez lui.
  • 14h- 19h. Antonio continue de couper, mais fait aussi de la formation avec les tailleurs les plus jeunes de l'atelier. L'atelier a maintenant 8 tailleurs, dont 5 ont moins de 40 ans et sont encore en formation. Antonio est passionné par l'art sartorial et la formation de ses apprentis. Il cherche des jeunes qui partagent cette passion et il essaie de les aider à grandir. Dans tout ce qu'il fait, il essaie de transmettre cette passion et attend la même chose de ses juniors.
  • 19h. Antonio rentre chez lui pour dîner avec la famille de sa fille qui habite à côté de lui. Son travail commence tôt, mais à 19 heures, il ne s'attarde pas sur son travail plus longtemps et préfère passer du temps avec sa famille et récupérer. Il est au lit avant 22h, prêt pour une prochaine journée bien remplie.


Mots de Mark Cho et traduits par nous même. L’article original en anglais est disponible ici. (http://www.markcho.com/for-rake-japan/2016/10/4/antonio-liverano-liverano-liverano)
 

 

Interview de Romain Biette, fondateur d'Ardentes Clipei

 

Cette semaine on est allé à la rencontre de Romain Biette,
un jeune tailleur français qui a fondé sa propre entreprise à Paris.

Romain biette ardentes clipei

Bonjour Romain, peux-tu te présenter en une phrase ?

Romain Biette, 26 ans, tailleur et fondateur d’Ardentes Clipei.

Quel est ton parcours ? Ta formation ?

Je suis né à et j’ai grandi à Paris. Un pur produit de l’ouest parisien. Tous les parisiens te le diront : chaque rive, chaque quartier a un peu ses particularités. Ce qui fait que j’ai grandi dans un environnement où il n’était pas anormal que les gens soient en costume. Par exemple mon père, qui est avocat, l'est très souvent. Il n’est pas spécialement passionné par le vêtement mais il a une élégance assez brute, assez naturelle. C’est quelque chose que j’ai su apprécier assez tôt et qui m’a donné envie de porter de le porter. J’étais également dans un lycée disons un peu sévère où l’on m’avait imposé de le porter. C’était ma vraie première expérience, j'avais 14 ans.

A partir de 15 ans, j'ai commencé à bosser l’été. Je dépensais tout dans les fringues. Je me souviens que j’avais fait la bêtise d’acheter des chaussures chez Gucci. C’était en 2006, après Tom Ford. Leur collection était très stylée…Je possède d’ailleurs encore un manteau. Mais les chaussures je les ai jetées. Je me suis dit c’est bizarre, on m’avait vendu la qualité mais ce n’est pas ça la qualité. Qu’est ce qu’il y a au-dessus ? Si ce n’est pas l’industrie du luxe, qu’est ce que c’est ? J'ai d'ailleurs compris à ce moment là que c'était plus devenu une industrie que du luxe. Ce n'est que plus tard que je découvrirais l'artisanat, via des blogs comme Parisian Gentleman (PG). Je ne me suis jamais réellement plongé dans Bonne Gueule ou dans les forums, je suis clairement un produit de PG, qui m'a ouvert les yeux concernant la grande mesure. Avant pour moi le plus beau costume du monde, c'était un Ralph Lauren Purple Label ! 

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Et c’est aussi à cette époque que j’ai vu le trailer de O’mast. Je me suis dit mais « qu’est ce que c’est que ce truc de malade. » J'ai du le voir 500 fois. Ça m’a donné envie d’aller à Naples et à Hong Kong (d'où viennent les producteurs du documentaire, les fameux Mark Cho et Alan See de The Armoury). Et j’y suis allé ! A Hong Kong, j’ai vraiment senti quelque chose que l’on ne retrouve pas en France…Il n'y pas autant de barrières, tout va beaucoup plus vite, c'est le paradis des entrepreneurs ! A mon retour, je me suis donc dit « c’est bon j’arrête mes études de droit ». Et c’est comme ça que j’ai suivi la formation de l’AFT pour devenir tailleur. Elle a durée 2 ans. C’est la dernière formation de tailleur en France, créée en 2005 par le maitre tailleur et président de la fédération des maitres tailleurs de France André Guilson. Un peu tout seul il faut dire, car l'Etat s'est totalement désintéressé de la transmission du métier aux générations futures. 

 

 
Je me souviens que j’avais fait la bêtise d’acheter des chaussures chez Gucci. C’était en 2006, après Tom Ford. Leur collection était très stylée…Je possède d’ailleurs encore un manteau. Mais les chaussures, je les ai jetées.
— Romain Biette
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Au début ça a été dur car tu vois qu'en réalité les choses sont loin de ce qui est écrit dans les blogs… La grande mesure a beaucoup souffert en cette seconde moitié du XXème siècle. 40 000 tailleurs il y a 50 ans et moins de 1000 établis aujourd’hui. Ils se sont pris l'industrialisation dans la figure, l'abandon progressif du costume et de toute forme de formalité, la hausse du coût du travail, les délocalisations, les changements d'habitude de consommation... Et puis après 68 et l'idée du bac pour tous, les métiers manuel c'était mal vu ! La génération de nos parents manque donc à l'appel, aujourd'hui en tailleur tu ne trouveras que des gens de 70 ans ou de 25. 

 
[...] j’ai vu le trailer de O’mast. Je me suis dit mais qu’est ce que c’est que ce truc de malade. J’ai du le voir 500 fois.
— Romain Biette
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Travailles-tu tout seul ?

Oui. Je suis associé pour la grande mesure avec le maitre tailleur Didier Groult installé à Rouen sous le nom André Marcel Tailleur. Nous travaillons à quatre mains sur mes clients, même si lui est plus là pour apporter l'expérience nécessaire pour avoir un tombé parfait que pour faire le vêtement en lui même. L'objectif est que ce soit mon travail, avec ma patte personnelle ! J'aimerais reprendre à terme son atelier et garder la production de la grande mesure en Normandie. Je pense que la vie est beaucoup plus agréable avec une petite maison et un coin de verdure où se vider la tête le soir plutôt que de vivre dans une barre en banlieue parisienne ! L'artisanat est avant tout un projet humain, et je pense que tout le monde doit être gagnant : le client, le tailleur, le personnel. Sinon tout ça n'a pas de sens. 

Qu’est ce qui fait ta marque de fabrique ?

Je suis un concentré des trois grandes écoles sartoriales: 

  • Italienne pour l'importance de la ligne, des couleurs chaudes, des motifs, une structure légère qui permet à la personne d'être aussi à l'aise en costume qu'en t-shirt et jean !

  • Anglaise, principalement pour les tissus, que je trouve plus solides de manière générale. Je suis un très grand fan de tweed et de Donegal

  • Française parce que j'ai appris à me soucier de tout dans les moindres détails... Un costume français réussi, c'est avant tout une couture droite, un point fin et régulier, un repassage impeccable.

Un rappel sur la provenance du nom de ta marque ?

Je me sens français avant tout, mais ce qui vient après est le fait que je me sente européen. De plus je fabrique tout en Europe: tissus anglais et italien, demi mesure fabriquée en Italie ou en Pologne, ou encore la grande mesure qui est fabriquée en France. J'ai donc voulu utiliser la langue européenne: le Latin. Ardentes Clipei signifie "boucliers étincelants" et renvoi à l'idée que le costume est une protection, pensé de telle manière qu'il vous rend plus beau et plus fort !

De quoi est composée ton offre ?

Je propose aujourd'hui trois niveaux de fabrication: une demi-mesure polonaise, une demi-mesure italienne, et de la grande mesure française. 

Plein de détails se retrouveront quelque soit l'offre, comme la milanaise par exemple (boutonnière réalisée à la main sur le revers). 

Quelles sont tes sources d’inspiration ?

Ma principale source d'inspiration est la beauté. Après pour parler de sources plus directes, j'aime particulièrement  le Cinéma, la Photographie et l'Architecture. 

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Tes modèles en matière d'élégance ?

Dans ceux qui ne sont plus de ce monde, Jean Gabin, Lino Ventura, Yves Montand. Sinon Alain Delon qui combine la beauté, le style et l'élégance ou Ralph Lauren parce qu'il est un modèle de réussite. Sinon dans le métier et plus jeunes, j'aime beaucoup les tailleurs Andrea Luparelli et Mariej Zaremba ! 

 

Je vais te poser la même question que j’ai posée à Maxime Toren : le sur-mesure (grande mesure j’entends) est-il vraiment le Saint Graal ?

La difficulté c’était : qu’est ce qui fait l’intérêt de la grande mesure ? Hugo Jacomet à répondu : patronage unique.  Ça c’est le postulat de Parisian Gentleman, que je respecte. Mais je ne suis pas totalement d'accord, car beaucoup de tailleurs utilisent des gabarits pour aller plus vite, et tu en as même qui vont jusqu'à altérer un patronage standard, comme en demi mesure! Pour moi la différence se fait plus sur le fait que la demi mesure, il y a la prise de mesures, avec la fabrication d'un costume qui arrivera fini selon les mesures prises. Quand le client est simple à habiller et que le preneur de mesures est bon, ça tombera parfaitement, sinon il y aura quelques petites retouches à faire. La grande mesure, c'est une prise de mesure, un premier essayage qui permet de prendre en compte plein de détails physiques directement sur le col (on pourra ainsi enlever facilement un pli nuque, ouvrir une emmanchure parce que le client a les épaules un peu en avant etc...), un second essayage avec le col et les manches bâties, ce qui permet de pouvoir régler au millimètre ces deux parties du costume qui sont les plus complexes à altérer le costume fini. Tout ça pour arriver à la fin à un vêtement qui tombera comme une seconde peau... Et puis il y a l'expérience, qui est unique ! 

En conclusion, la grande mesure est comme un grand restaurant ou une voiture de collection, il est malheureusement réservé à peu de personnes mais c'est un moment d'existence privilégié qui vaut largement l'argent qu'il coûte ! Chez moi à partir de 4000€ pour 70 heures de travail. 

 

Un détail que tu apprécies ?

Une belle manche, c'est la chose la plus complexe à réaliser et c'est réellement comme ça que je détermine si un costume est réussi ou non ! 

Plus jeune, je ne jurais que par l'épaule napolitaine, car j'étais totalement hypnotisé par le style italien qui se reconnait à 100 m. J'ai mis beaucoup plus longtemps à comprendre ce qui faisait la richesse du style français: une belle épaule, avec juste ce qu'il faut de cigarette, pas un pli, et une manche qui tombe parfaitement, c'est magnifique !! Et c'est deux fois plus complexe à réaliser qu'une épaule napolitaine, où la fronce (qui laisse apparaître quelques plis) est considérée comme un style alors qu'en France, elle est considérée comme une imperfection. 

J’ai vu que tu as rencontré Nicolas Radano et Maximilian Mogg. Pourrais-tu nous dire quelques mots à ce sujet ? Est-ce que des collaborations sont à prévoir ?

J’ai fait deux trunkshows chez Maximilian Mogg à Berlin. L’objectif est recevoir également des trunkshows et des events dans mon atelier parisien afin de promouvoir des gens dont j’apprécie le travail. Comme par exemple Guillaume Lancelot qui fait de la maroquinerie haut de gamme.

Pour finir, un livre ou un restaurant à nous conseiller ?

Bel Ami de Maupassant. Ce que j’aime c’est la détermination du personnage, cette capacité à dépasser son milieu social et à se faire une place de choix au sein de la société. Et puis Maupassant décrit à merveille la fin du XIXème siècle qui est une période qui me passionne !

romain biette tailleur costume ardentes clipei paris
romain biette tailleur costume ardentes clipei paris

Merci à Romain d'avoir pris le temps de répondre à nos questions.

 

Costume sur-mesure : Maxime Tormen nous aide à y voir plus clair !

 

Maxime, étant donné que tu as travaillé chez les plus grands tailleurs européens (Sartoria Ripense ou encore Kathryn Sargent), peux-tu nous expliquer globalement (chaque tailleur ayant ses propres méthodes) le processus de création d'un costume dit bespoke* ?
*Définition de ParisianGentleman : Réalisé à partir d'une feuille blanche, il ne s'agit pas d'un réajustement d'un patron existant aux mesures du client

Note de la rédaction : excepté les 4 photos en fin d'article, toutes les photos on été prise par Maxime lorsqu'il travaillait chez Sartoria Ripense et Ilario Piscioneri à Rome ou encore chez Kathryn Sargent à Londres.

Sur Savile Row, chez Kathryn Sargent :Choix du tissus, patronnage et découpe par Alistair le "cutter" de la maison 

Sur Savile Row, chez Kathryn Sargent :
Choix du tissus, patronnage et découpe par Alistair le "cutter" de la maison

 

Prima prova

Lorsque le client arrive au magasin, on détermine dans un premier temps avec lui ses besoins spécifiques : pour quel type d’événements le costume est destiné, les détails qu'il souhaite ou encore le choix du tissus.
Ensuite on prend ses mesures. La largeur des épaules par exemple. On prend en moyenne 7 à 8 points de mesures différents.

Avec les mesures, on dessine un patron exclusif et personnalisé pour le client. Par la suite on place le patron sur le tissu préalablement choisi par le client pour procéder à la découpe. Il s'agit du tissu définitif.

Une fois ces étapes réalisées, on peut passer à la fabrication du costume en assemblant chaque partie de manière grossière (coutures rapides à la main : c'est les fils du "bâti") pour avoir une idée plus précise sur les retouches à faire. C'est ce qu’on appelle en italien "la prima prova" : soit le premier essayage en français. 

 

Seconda prova

Après ces quelques retouches faites sur le client, nous passons à la seconde étape qu’on appelle la "seconda prova". Le costume est à présent assemblé avec les coutures finales. La plupart des fils blancs du bâti - qui ne servent plus - sont donc retirés. D'ailleurs les anciens m’engueulaient souvent là dessus car il m’arrivait d’oublier de retirer ces fils.
On y ajoute certains détails plus compliqués à réaliser comme les poches intérieures et extérieures. Nous fixons aussi la doublure. Enfin arrive les finitions comme par exemple les points de fixations de la doublure.

Un troisième essayage est souvent effectué afin d’apporter quelques modifications notamment sur le montage de l'épaule (parfois la manche part un peu trop en avant ou inversement, un pli non désiré peut parfois apparaître..). 

 

De ces détails qui font la différence...

En haut à gauche : Là je fixe l'épaulette ou le padding, t'appelles ça comme tu veux...on est bien en Angleterre, l'épaule est épaisse !  Si tu veux faire l'Italien, il te suffit de retirer un peu de tissus, et si tu veux faire le Napolitain, tu ne mets rien...

En haut à droite : Une partie de la mise en place du second essayage par moi-même.

En bas à gauche : Il s'agit des mains de mon pote Oleg, ancien conducteur de Char d'assaut en Ukraine.
On fixe la doublure avec le fils blanc en essayant de faire un belle arrondi !

En bas à droite : Détails sur une doublure réalisés par moi-même lors d'un second essayage. C'est ce genre de détails où l'on peut voir des petites différences entre les tailleurs.
Les extrémités des coutures de la poche téléphone portable, doivent être identiques, ni trop élargies et inversement. Pareillement, les distances entre les points doivent être quasi identiques. Je le précise car il m'arrivait de me faire engueuler car c'était justement parfois trop parfait...similaire à une machine ce qui n'est pas bon, le client aime bien qu'on voit que c'est fait à la main !

 

Ces deux photos,  c'est quand je m’entraînais a faire des buttonholes et des milanaises. Elles ne sont pas parfaites mais c'est un bon début. Là encore tu peux voir les différences entre les tailleurs. Normalement il ne faut pas qu'on puisse voir les les points de couture aux extrémités des petits cercles.

Et les cercles doivent avoir la même distance. C'est pareil, au touché il ne faut pas qu'elle soit trop dur ou trop molle...

A gauche : Là je réalise la...pocket square. J'en oublie même les noms ! Entre l'italien, l'anglais et le français, c'est un vrai casse tête ! On doit parvenir à faire un belle arrondi aux extrémités. Ni trop gros, ni trop petit. Là aussi on fait vite la différence entre les tailleurs...A noter que j'ai rajouté un peu de thermocollé pour que ça soit plus résistant.
Au milieu : Faire attention à bien superposer les motifs entre les différentes parties. C'est encore sur ces détails qu'on peut voir la différence entre les tailleurs...notamment au niveau des poches, du dos ou du col.
A droite : Grosse différence entre les Anglais et Italiens, mes points de couture sur le col sont à l'horizontale chez les Anglais, en Italie souvent à la verticale.

En haut à gauche : Mr Pino avec mon gilet Browns Beach d'Anatomica. Je ne comprenais jamais rien quand il me parlait avec son ton de voix Sicilien mais je répondais :
"Si ,Si"..
 

En haut à droite : Alfonso au boulot avec ma souvenir jacket !
 

En bas à gauche : Alfonso au boulot avec ma Campus jacket Mister Freedom, je venais de la recevoir, elle était encore relativement blanche !
 

En haut à droite : Le métier qui rentre !

 

 

Merci Maxime pour tes réponses !

Si l'on résume:

  • 1er rendez-vous : discussion sur le type de costume voulu et première prises de mesures
  • 2ème rendez-vous : essayage du costume réalisé à partir des mesures
  • 3ème rendez-vous : essayage du costume quasi-définitif
  • 4ème rendez-vous : le costume final est remis au client

En images accélérées, on obtient :

Crédit photo : thebespokedudes