Suit Supply - TEST Costume HAVANA

 

Si vous lisez régulièrement les blogs de mode vous connaissez sans doute déjà SuitSupply. Dans le cas contraire, la séance de rattrapage c’est par ici chez nos amis de BonneGueule.
Attiré moi aussi par leur collection alléchante et leurs prix ultras compétitifs, j’ai décidé de visiter pour vous la boutique Suitsupply à Bruxelles. C’était à mon avis le meilleur moyen de se faire un avis personnel sur la marque. Car oui il n’y pas encore de boutique à Paris, mais qui sait dans quelques années … ;)

Question logistique, pour ceux qui habitent Paris il n’y a rien de plus simple. Vous pouvez opter pour le train, la version low cost IZY Thalys offre des billets à partir de 10€ - difficile de faire moins cher-, le bus ou encore le covoiturage. Vous en aurez pour 2h30 de trajet dans le meilleur des cas.

Bruxelles est incontestablement une très belle ville. Donc vous profiterez de votre passage pour aller visiter la Grand-Place (incontournable) ou encore d’autres boutiques comme la Maison Degand qui dispose d’une très belle sélection.

La boutique SuitSupply Bruxelles
La boutique SuitSupply est située à proximité du palais de Bruxelles. Cette rue abrite également d’autres boutiques de vêtement comme Ermenegildo Zegna. Elle reste toutefois légèrement à l’écart des rues les plus touristiques de la ville. Vous n’aurez pas besoin d’affronter une foule immense pour y parvenir.
Et bonne nouvelle, la boutique est ouverte le dimanche aussi ! Pour ceux qui n’ont pas le temps la semaine, il vous reste cette possibilité. (Correction de la rédaction : des lecteurs nous ont informés que la boutique n'est plus ouverte le dimanche...)

Vue panoramique de la boutique

Vue panoramique de la boutique

La marque néerlandaise a un ADN Italien très prononcé. Et de fait vous ne trouverez très peu de noir. Pour notre plus grand plaisir d’ailleurs. Au niveau décoration d’intérieur, les publicités très osées qui ont fait beaucoup parler d’elles se retrouvent accrochées à tous les murs. Pour le reste (couleurs des murs et du sol, mobiliers, matières utilisées…) j’y suis un peu moins sensible, trop proche à mon sens de ce qu’on peut retrouver chez d’autres marques de prêt-à-porter qui ont une offre moins qualitative. Je préfère le travail d’un Laurent Deroo pour A.P.C par exemple. Bon comme toujours je suis pointilleux parce qu’au global elle est très bien cette boutique. 

Le noir est réservé aux dinner suit (c'est-à-dire les soirées très formelles type festival de Cannes)

Le noir est réservé aux dinner suit (c'est-à-dire les soirées très formelles type festival de Cannes)

Elle est bâtie sur 3 niveaux. Au niveau -1 vous trouverez une sélection de pièces casuales, les accessoires/chaussures et les différentes possibilités en termes de chemise sur-mesure.  A ma grande déception je n’ai pas retrouvé toute la sélection vue en ligne qui est en boutique. Notamment sur la partie Outerwear. Où étaient les manteaux ? Ce n’est pas faute d’avoir cherché. La prochaine fois je demanderai c’est promis.

Le niveau -1 sous un autre angle de vue – On distingue à gauche le mur de cravate

Le niveau -1 sous un autre angle de vue – On distingue à gauche le mur de cravate

Bon j’ai tout de même été agréablement conforté sur la qualité de leurs produits. Les chemises en cachemire m’ont assez impressionné. Très douces comme vous pouvez vous en doutez mais elles conservent un côté formel : elles peuvent donc être portées dans un contexte Business. Le tissu provient de chez Thomas Mason, célèbre maison anglaise de fabrique de tissus détenue par Albini

C’est du joli !

C’est du joli !

Vous pourrez également essayer leurs pantalon en flanelle (modèle Soho par exemple) ou encore leurs jeans. Un bon moyen de vous faire une idée sur votre taille.

Ca sent les bonnes finitions !

Ca sent les bonnes finitions !

 

Ils disposent également d’un mur avec une très bonne sélection de cravates à des prix imbattables. Mon seul regret étant qu’il n’y en a peu en 7.5 cm, (elles sont en 8cm) qui à mon sens la taille idéale pour les personnes avec une silhouette plutôt élancée. Mais c’est vraiment parce que je suis pointilleux.

Au rez-de-chaussée et au second niveau vous trouverez des costumes. Plusieurs systèmes de tailles sont proposés : normal, long et short. Tout dépend de votre morphologie. Pour chacune des catégories vous retrouverez la catégorisation habituelle du prêt à porter : du 42 au 58. Mais pas de panique, les vendeurs sont là pour vous guider si vous êtes un peu perdu. Et je vous rassure tout de suite, certains vendeurs parlent parfaitement français ! Aucun problème à ce niveau là. Et si vous achetez sur internet, les mesures sont bien renseignées pour vous guider.

Point positif également, de grandes cabines d’essayage sont à votre disposition, loin des cabines assez étriquées que l’on peut trouver parfois à Paris. Dernier point, la boutiques propose des services sur-mesures. Mais ce sera l'objet d'un prochain article.

 

Leur ligne de costumes
Avant de me décider à aller à Bruxelles, j’avais bavé des heures à regarder la ligne Jort, à analyser les photos et les descriptions. Un peu comme ceux qui avant l’achat d’un gadget électronique se mettent à comparer pendant des heures les produits existants sur le marché. J’avais donc trouvé mon costume idéal : des épaules avec très peu de padding, des tissus à tomber par terre, une construction entoilé et…un prix ultra compétitif.

Une vidéo YouTube présente d’ailleurs les caractéristiques et la fabrication de la ligne JORT. Et le présentateur n’est autre que…Jort Kelder himself. Soit celui qui a imaginé cette ligne. Elle est largement inspirée de ce qui se fait en Italie mais est produite en chine pour des raisons de coûts. Pour la petite histoire, Jort est un journaliste de formation et présentateur télé néerlandais qui est passionné par les beaux vêtements.

Ici Jort dans l’atelier en chine qui produit la ligne JORT

Ici Jort dans l’atelier en chine qui produit la ligne JORT

Jort apparait également dans une vidéo critique sur le Pitti Oumo. Assez drôle, elle commente les personnages qui arpentent le salon. Et pour y avoir été physiquement, je confirme le ressenti de Jort. J’ajouterai même que dans certains halls j’avais parfois plus l’impression d’être à une soirée type Night Clubbing que dans un salon professionnel de mode masculine.

Ici Jort nous explique que ça m’étonnerais que cet homme téléphone. Et on veut bien le croire

Ici Jort nous explique que ça m’étonnerais que cet homme téléphone. Et on veut bien le croire

Notre ami Lino visiblement bien accompagné…

Notre ami Lino visiblement bien accompagné…

Mais rien ne vaut le réel. Comme sur Tinder, vous aurez beau regarder les photos dans tous les sens, rencontrer la personne en vrai reste (encore) le meilleur moyen pour être fixé. En quelques minutes j’ai donc pu remarquer que ce n’était pas la ligne JORT qui me faisait de l’œil, non non, mais la ligne HAVANA ! Pourquoi ? Parce que je voulais absolument un costume très léger qui se porterait quasiment comme mon jogging et mon sweat Uniqlo. A la fois léger et qui n’entrave pas mes mouvement. Et qui ai de la gueule bien entendu. Et c’est bien le modèle Havana qui répondait à mes critères. Les épaules sont déstructurées (aucun padding contrairement au modèle JORT) et certains modèles non doublés. Mon seul regret concerne les poches plaquées. Il n’y a que ce modèle de proche sur tous les costumes de la gamme.

Test Costume – Havana Traveller
Mon choix s’est porté vers le modèle Traveller car la veste n’est pas doublée. De plus, son tissu infroissable qui provient de chez Cerutti est topissime. Il est suffisamment lourd pour avoir un bon tombé et assez fluide pour être ultra confortable. J’ai opté pour une taille normale, taille 46. Pour information je fais 1m85 pour 75kg.
La veste nécessitait une retouche pour le cintrage. De même pour le pantalon. Comptez 3 jours au minimum si vous avez des retouches « compliquées » (ajuster le ceintrage, affiner un pantalon)
Pour les ourlets en revanche, il est possible - à priori -  de le faire dans la journée. N’hésitez pas à appeler avant de vous rendre à la boutique pour être sûr de leurs disponibilités et de ce qui pourra être réalisé. 
N’ayant pas prévu de rester sur Bruxelles plusieurs jours, j’en ai profité pour tester la vente par internet. J’ai reçu mon colis dans les temps. Par contre pour ceux qui ne sont pas chez eux pour la réception du colis c’est un peu plus compliqué. Non pas à cause de SuitSupply mais d’UPS. Comme vous le savez service de la Poste offre la possibilité de venir récupérer son colis dans un bureau de poste en cas d’absence. Chez UPS ce n’est pas le cas systématiquement, ce qui peut s’avérer assez énervant pour ceux qui n’ont pas beaucoup de disponibilités…

Vous recevrez votre colis dans un bel emballage en carton blanc. Le costume y est soigneusement emballé dans une housse prévue à cet effet. Vous recevrez également un échantillon de tissu du costume.

suitsupply pitti uomo costumes suitsupply boutique bruxelles

 

Ce n'est pas pour recoudre, mais pour tester le tissu au lavage. Bon, mis à part le pantalon (et encore), je le déconseille priori. Mieux vaut le laisser chez un professionnel.

 

carton costumes suitsupply boutique bruxelles
Une housse qui permet de le transporter avec soi : très pratique ! En plus elle est déperlante.

Une housse qui permet de le transporter avec soi : très pratique ! En plus elle est déperlante.

Des poches ont même été prévu pour emporter avec vous quelques accesoires

Des poches ont même été prévu pour emporter avec vous quelques accesoires

Dès l’ouverture, on apprécie les détails que l’on ne retrouve pas dans le prêt-à-porter standard. Enfin pour le moment. Je veux parler des coutures au niveau des fentes d’aisance et des manches.

Fentes d’aisances cousues à la réception du colis

Fentes d’aisances cousues à la réception du colis

Manches cousues – on apprécie également que les boutons soient fonctionnels ! On peut les ouvrir. L’ADN de ce costume se voulant très italien, ils se chevauchent légèrement.

Manches cousues – on apprécie également que les boutons soient fonctionnels ! On peut les ouvrir. L’ADN de ce costume se voulant très italien, ils se chevauchent légèrement.

Sur ces deux photos on distingue également le grain du tissu. Comme dit précédemment,  Il s’agit d’un Hopsack ou aussi appelé laine froide. Ces tissus ont la particularité d’être infroissable et très respirant.  Parfait pour l’été donc. Mais pour ceux qui se demandent s’il possible de le porter en autonome hiver, je répondrais oui. L’absence de padding aux épaules vous permettra d’enfiler facilement votre manteau préféré par-dessus. D’ailleurs Nicolas Gabard de la marque Husband explique bien ici que ses costumes en laine Fresco (encore un autre nom de la laine froide) se vendent toute l’année et pas uniquement en été.

Je l’ai porté pendant plus de 6 mois de manière intensive. Intensive ? Oui tous les jours de la semaine. Enfin les jours ouvrés. Donc 5 jours / semaine. Alors oui je suis un gros crade, dégueulasse et tout ce que vous voulez. Toujours est-il que je peux vous affirmer que le pantalon résiste vraiment bien. Et vous le savez, il s’agit de la pièce la plus fragile car soumise à beaucoup de frottements. Ce n’est pas pour rien que chez les tailleurs en grande mesure, on vous propose souvent d’emblée de réaliser un deuxième pantalon. La veste est moins soumise à ces contraintes. (Heureusement, sinon ça reviendrait cher !). Mon pantalon est quasiment comme neuf ! On peine à distinguer les marques de frottement.

Quant à ceux qui se demandent si l’absence de rembourrage aux épaules ou la matière très fluide ne se remarque pas trop, ne rend pas le costume trop casual et pas assez formel, ma réponse est claire : il n’y a aucun problème à ce niveau là. Le costume peut sans aucun doute être utilisé dans un environnement professionnel très strict. Il a été pensé dans cette optique. Les autres personnes n’y verront que du feu comme on dit.

Il m’arrive de porter un sac à dos avec ce costume. Oui vous savez, les sacs à dos pas très beau type Dell que votre entreprise de consulting vous offre gracieusement parce qu’elle ne sait plus où les entasser. 

Un sac dans ce style là

Un sac dans ce style là

Benoît de BonneGueule m’a demandé si le costume - les épaules en particulier -  ne se déformait pas à cause de ce sac. Je ne pouvais répondre car je ne l’avais pas suffisamment porté. C’est chose faite. Je peux affirmer que le sac à dos ne déforme pas le costume (dans ce cas-ci) mais que par contre les frottements ont abîmé prématurément les coutures. Fort de ce constat, je suis moi aussi passé à un sac du type Porte-document.

Le costume est également bien fourni en poches. Ils ont prévu des poches pour les téléphones portables.  Par contre, manque de bol elles sont un peu justes si vous avez un iPhone. (et n’importe quel Smartphone d’ailleurs)

Et sinon une fois porté il ressemble à quoi ? Réponse en images.

Vous aurez remarqué que je porte des clarks desert boots original. Oui oui.

Vous aurez remarqué que je porte des clarks desert boots original. Oui oui.

A noter que je n’ai fait retoucher que le pantalon. 48€ pour raccourcir la longueur et affiner les jambes. J’étais chez un retoucheur particulier (pas Suitsupply donc).

Quand je vous disais qu’il s’agissait d’une matière très respirante, vous me croyez maintenant ?

Quand je vous disais qu’il s’agissait d’une matière très respirante, vous me croyez maintenant ?

Oui on est d’accord, le dos mériterait une petite retouche pour le cintrage.

Oui on est d’accord, le dos mériterait une petite retouche pour le cintrage.

Une Pocket square peut être ajoutée si vous le souhaitez

Une Pocket square peut être ajoutée si vous le souhaitez

J’en profite pour faire un petit commentaire sur les Pocket Square. Vous savez, ce carré de soie que l’on peut ajouter au niveau de la poche poitrine. C’est peu la cerise sur le gâteau.  Mais encore faut-il avoir le gâteau. Un peu comme s’il ajoutait un aileron de Ferrari sur une Twingo. Pas grand intérêt. Ceci dit, sur ce costume vous pouvez en porter, cela passe très bien.

Pour terminer, sachez qu’ils ont sorti un modèle similaire en gris anthracite.

costume suitsupply  traveller la défense travail paris

De quoi avoir la panoplie idéale. Avec quelques chemises (moins d’une dizaine) et quelques cravates différentes vous aurez pas mal de combinaison possible. A mon sens il s’agit d’une très belle offre proposée par SuitSupply.

2 costumes 5 chemises 3 cravates : soit 30 combinaisons possibles ! Ce qui vous permettra de vous habiller pendant plus d’un mois de manière différente.
En terme de budget :
2*400€ pour les deux costumes
+  5*60€ pour les chemises (79€ si vous prenez les chemises de la gamme Traveller)
 + 3*40€ pour les cravates
=  environ 1100€ ce qui n’est certes pas négligeable mais qui est raisonnable pour des tenues que vous allez porter toute l’année – et pas qu’une !

Enfin sachez que SuitSupply a rajouté une nouveauté dernièrement. Dès lors que vous avez repéré la coupe qu’il vous faut (Havana dans mon cas), il vous est possible de choisir le tissu –parmi une belle sélection - si ceux de collection actuelle ne vous conviendrais pas. Cela se passe ici.Cette fonctionnalité est également disponible pour les chemises.

 

Conclusion : le meilleur costume de ce style – non doublé et sans padding - que j’ai pu voir et porter à ce prix là (à savoir moins de 400€). Et promis je ne travaille pas chez eux, et je ne suis même pas sponsorisé pour ce test.


Bonus

Si vous cherchez une cravate pour aller avec votre costume, n'hésitez pas à jeter un coup d’œil à notre offre en propre. On propose des cravates de qualité, made in France et pas trop cher !

 

 

 

 

Liverano Liverano

 
liverano liverano florence
Crédits : I Colori Di Antonio

Crédits : I Colori Di Antonio

Si vous vous intéressez à l’univers du vêtement, et en particulier celui du costume, vousavez vraisemblablement déjà dû entendre parler d’Antonio Liverano.

Sa médiatisation (sur internet j’entends – il faudrait d’ailleurs inventer un mot pour ça) est intimement liée à celle de l’excellente équipe TheArmoury à Hong Kong. Ces 3 entrepreneurs ont mis en lumière, via de magnifiques photos notamment (cf le tumblr Ethandesu), le travail des meilleurs artisans mondiaux du vêtement masculin. Et c’est également eux qui ont produit le film.

 

Personnes clés  du documentaire

Antonio Liverano : tailleurIl maestro

Le documentaire est construit autour de lui. Il a rejoint Florence à l’âge de 20 ans pour travailler avec son frère et sa belle sœur. Au début ilstravaillaient ensemble pour des tailleurs mieux installés à Florence. Il s’agissait de leur « petites mains ». Puis petit à petit, avec le bouche à oreille ils se sont développés.

Antonio est un autodidacte. Bien entendu son frère et sa belle sœur lui ont beaucoup appris. Mais il n’a pas eu de vrai maître. Personne ne l’a profondément influencé, il s’est développé tout seul et n’a cessé de regarder le monde qui l’entoure. Surtout lorsqu’il travaillait au-dessus du restaurant Sabatini dans lequel il a vu passer des célébrités américaines : Gary Cooper, Gregory Peck…
Il s’est forgé un œil critique et ce notamment sur les tenues vestimentaires de ces acteurs Hollywoodien dans leurs films. Cela a grandement participé de sa progression. Son œil s’est affuté. Il précise qu’encore aujourd’hui, lorsqu’il voit un homme bien habillé, il n’hésite pas à s’arrêter pour regarder. - et ce toujours dans l’idée qu’il peut perfectionner et s’inspirer pour son propre travail -
Un peu comme Bruce Lee qui puisé ce qu’il y avait de meilleur dans chaque art martial pour créer son propre style : le Jet Kundo. Oui Antonio c’est le Bruce Lee des tailleurs. Rien que ça.

Et pour ne rien gâcher, il a les pantalons les mieux coupés du monde. Enfin à mon sens. Pourquoi ? Sans doute parce que je fais partie des personnes qui préfèrent quand le pantalon ne « casse pas » sur les chaussures et qu’il est porté assez haut. Le style années 30 en plus moderne.

Ici lors d’un évènement du luxueux Rake magazine : De droite à gauche : Lorenzo Cifonelli, Edward Sexton, Richard Anderson, Antonio Panico, Antonio Liverano et John Hitchcock.N’a-t-il pas le pantalon le mieux coupé ? (Ok Lorenzo Cifonelli n’est…

Ici lors d’un évènement du luxueux Rake magazine : De droite à gauche : Lorenzo Cifonelli, Edward Sexton, Richard Anderson, Antonio Panico, Antonio Liverano et John Hitchcock.
N’a-t-il pas le pantalon le mieux coupé ? (Ok Lorenzo Cifonelli n’est pas en reste)

Autre exemple ici avec Bruce Broyer – Auteur notamment du livre True Style dont j’ai commencé la lecture -Crédit : Thearmoury

Autre exemple ici avec Bruce Broyer – Auteur notamment du livre True Style dont j’ai commencé la lecture -
Crédit : Thearmoury

Il suffit sinon de regarder ses photos sur Google image : je ne le prends quasiment jamais en défaut. Le tombé de son pantalon est tout simplement miraculeux.

Et que dire de ses Alden de 15 ans d’âge ! 15 ans ! Mis à part les plis d’aisance, elles sont comme neuves. J’ai d’ailleurs lu qu’Alden travaille également pour des personnes handicapées. On peut donc imaginer qu’ils savent comment réaliser des chaussures confortables. 

liverano liverano florence
Oui oui ce sont bien les Alden d’Antonio (je n’ai pas pris une photo au hasard sur internet)Crédit : Ethandesu

Oui oui ce sont bien les Alden d’Antonio (je n’ai pas pris une photo au hasard sur internet)
Crédit : Ethandesu

Présentons à présent son bras droit : Takahiro Osaki alias Taka 
Son Instagram ici (il ne le met pas à jour très souvent)

liverano liverano florence taka

Il vit depuis 10 ans à Florence. Il est arrivé en tant qu’étudiant dans une école de langue où il a appris l’Italien. C’est ainsi qu’il a connu Antonio. Il accompagnait un ami qui souhaitait avoir un costume Bespoke. Taka faisait la traduction. Après quelques autres échanges, Antonio lui a proposé de venir travailler pour lui.
Et il lui a proposé d’une façon plutôt directe : « Tu as de beaux yeux, pourquoi ne viens-tu pas travailler pour moi ? » Véridique ! Ah ces italiens… (voir l’interview de Taka rapportée sur le site de Mark CHO ici )
Après une semaine passée chez eux à voir comment ils fonctionnaient Taka décida d’accepter.
Taka est donc parti de zéro, il ne connaissait rien à l’art Sartorial. Antonio lui a donné sa chance.
Et à raison ! Taka développe ainsi l’idée capitale qu’être être un gentleman ne consiste pas seulement à porter des vêtements élégants, c’est beaucoup plus large et vaste que cela : le savoir être et le savoir-vivre doivent également refléter un certain style, une certaine beauté.
Pour développer votre sensibilité, vous pouvez par exemple allez dans les musées afin de voir comment les couleurs s’accordent. Ou dans la nature. Chaque saison à ses couleurs particulières (et ses températures) et qui devraient vous inspirer à vous habiller.
D’ailleurs je vous conseille d’aller à Florence, vous comprendrez pourquoi c’est là bas qu’on fabrique parmi les meilleurs costumes du monde. Je suis naturellement passé devant leur boutique Via dei Fossi mais celle-ci était malheureusement fermée pour cause d’inventaires.

Ceux qui habitent à Paris : le Louvre et le musée d’Orsay vous attendent.

Gallerie Uzzi (en partie rénovée en 2014 par la maison Fendi)Crédit : Wikipédia

Gallerie Uzzi (en partie rénovée en 2014 par la maison Fendi)
Crédit : Wikipédia

Parc de Versailles en automne

Parc de Versailles en automne

Peux ceux qui ne peuvent ou ne veulent aller dans des musées mais s’intéressent tout de même  à l’histoire de la couleur, ses interactions et perceptions il existe quelques livres à ce sujet. Je vous conseille de commencer par ceux de Pastoureau.
Vous y apprendrez des choses peu expliquées : « Dans une voiture, le plus important pour moi est la couleur de la carrosserie. Je ne suis du reste pas le seul à lui donner de la priorité : différentes enquêtes d’opinion conduites au cours des cinq dernières décennies ont montré que la couleur était non seulement un critère de choix important lors d’un achat d’un véhicule, mais parfois même le critère le plus important après le prix : plus que la marque, plus que le modèle, plus que les performances ou tout autre qualité, ce qui compte pour certains acheteurs, plus qu’on ne croit, c’est la couleur.»

La couleur est un des aspects fort du film. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien si le tire du documentaire est : Antonio’s color. L’équipe Liverano Liverano aide le client à choisir les couleurs qui lui vont (en fonction de son teint, la couleur de ses cheveux, de son style général..) età les associer également afin de créer des contrastes agréables à l’œil.

 

Vous remarquerez que Taka et Antonio ont pour habitude d’utiliser des écharpes aux couleurs vives pour égayer leurs tenues hivernales.

Taka en Barbour et écharpe multicolore Liverano

Taka en Barbour et écharpe multicolore Liverano

Qemal Selimi :
Son instagram ici

liverano liverano florence qemal selimi

Il est fait partie de la nouvelle génération de l’équipe Liverano Liverano. A ces débuts, il n’a pas hésité à parcourir plusieurs centaines de kilomètres de manière quotidienne pour travailler avec Antonio.

liverano liverano florence

Le deuxième garçon de la nouvelle génération Liverano Liverano est Coréen. Il a fait une école de mode à Milan. Mais Antonio n’a pas confiance dans ces écoles. Pour lui elles n’apprennent rien ! En tout cas sur l’art Sartorial. Cela rejoint l’avis de Patrick Johnson (un tailleur Australien qui monte, qui monte…) qui dans une interview explique qu’au début de ses études dans le célèbre Saint Martins College of Art and Design il pensait que « Helmut Lang était la meilleure chose au monde ». Mais ça c’était avant qu’il ne rencontre un tailleur basé à Londres.

C’est probablement une des raisons qui poussera Antonio à créer une école sur l’art Sartorial dans les années à venir. Un peu dans l’esprit de l’école de fabrication de chaussures sur mesure du très respecté Stefano Bremer (parti malheureusement trop tôt). Mais ces projets prennent du temps. Patience, patience…

Gianlucca Migliarotti

Le réalisateur est Gianlucca Migliarotti. Il a en outre réalisé O’mast & È poi c’è.
Pour comprendre sa vision du monde et donc du vêtement masculin, vous pouvez lire cette excellente interview donnée ici dans le cadre de la présentation de son autre film O’mast il y a quelques années en arrière. En 2011 pour être précis.
Une interview pleine de vérités. Je me sens un peu obligé de vous la commenter en quelques lignes. Vous y retrouverez l’explication sur la différence entre le Bespoke et le Made To Measure. Et pour la faire courte, elle rejoint celle d’Hugo Jacomet dans son interview récente pour BonneGueule : le costume Bespoke est réalisé à partir d’une feuille blanche. Le costume en demi-mesure s’appui quant à lui sur des patrons déjà existant qui sont réajustés à vos mesures.
Le Bespoke tailoring est un vrai travail d’ARTisanat. Gianlucca pense que le costume bespoke est imparfait par définition : il est réalisé à partir de rien et entièrement à la main. La perfection est le synonyme des costumes industriels. Il rejoint ainsi une théorie esthétique Japonaise : le Wabi Sabi. Une forme de beauté se dégage des objets imparfaits. Geoffrey en a également déjà parlé dans cet article.
Gianlucca est également un observateur très fin. Par exemple, sur la différence entre la culture vestimentaire à Milan et Naples. Entre ceux qui s’habillent en Prada et ceux qui vont chez un tailleur Bespoke. Entre ceux qui portent du noir (très courant à Milan) et ceux qui préfère plus de couleur. (à Naples).  

If you have to go to a business meeting, it’s considered much more elegant to wear a navy suit and dark brown shoes.

Si vous devez aller à un meeting d’affaires, il sera considéré plus élégant de porter un costume bleu avec des chaussures marron” : sous-entendu que de porter des chaussures noires avec un costume sombre.
— Gianlucca Migliarotti

Mais les lignes bougent, et à coup de blogging je pense qu’on va y arriver aussi en France. Encore 10 ans. Le noir ne sera plus que réservé qu’aux soirées très formelles.
Le McDo en prend lui aussi pour son grade même si la culture napolitaine résiste plutôt bien au mondialisme. Effectivement difficile de s’imaginer un garçon habillé de bas en haut en Liverano Liverano (ok ce tailleur est florentin, mais peu importe) et qui va manger au Mcdo du coin. Impossible.  A la trattoria du coin oui. La culture Sartoriale n’aurait pas pu se développer sur un autre terrain. C’est la culture du beau et de la patience. Et une fois que cette sensibilité au beau est développée, celle-ci s’applique partout et tout le temps. Votre lifestyle devient autre.
Cette vision de la vie et du vêtement est comme nous l’avons vu globalement partagée par le clan Liverano Liverano. L’interview qui est faite de Gianlucca Migliarotti ressemble de ce point de vue beaucoup à celle de Taka. C’est une récurrence qui s’explique probablement par le fait que lorsque vous avez beaucoup observé et réfléchi à une question particulière vous arrivez aux mêmes conclusions mais par des chemins différents.

La patte Liverano Liverano

Qu’est ce qui fait la différence entre Liverano et les autres tailleurs ?  
Comme le dit Antonio la veste doit transpirer la passion transmise par le tailleur. Et cela passe par un ensemble de détails qui font qu’un costume de chez Liverano ne ressemble à nul autre.

Caractéristiques de leurs costumes :

  • L’épaule est légèrement débordante pour donner plus de carrure. Au niveau visuel celle-ci se rapproche de l’épaule Romaine. Classique et « propre » donc. Pas de décorations superflues. Pas de Spalla Camicia à l’horizon.

  •  Il y a très peu de padding (rembourrage au niveau des épaules). C’est une caractéristique encore assez rare à trouver en France. Mais là encore, à coup de blogging je pense que dans les années à venir la tendance devrait s’inverser. Si si vous verrez.

  • Les revers plutôt généreux (i.e pas étroits à la The Kooples).

  • Une proche poitrine plutôt basse pour souligner le col et le revers.

  • Des vestes à trois boutons en général mais utilisées comme des vestes à deux boutons en « roulant » la partie basse des revers.

  • Un costume de chez Liverano reste plus léger dans sa construction qu’un costume Romain, mais toutefois plus structuré qu’un costume Napolitain.

Bien entendu pour atteindre une certaine harmonie chaque détail est étudié comme faisant partie d’un tout : c’est un savant mélange de proportions entre les épaules, les revers ou encore le col. (Exemple : Les larges revers contrebalancent les épaules débordantes)

Présentation des matières, toute plus belles les unes que les autres

liverano liverano florence dormeuil
liverano liverano florence tissu dormeuil zegna
liverano liverano florence tissu zegna dormeuil vitale

Des matières qui viennent de chez Zegna, Draper’s ou encore le français Dormeuil. Vous remarquerez que les tissus employés sont plus colorés (plus clairs en fait) que ceux que l’on peut trouver dans le Nord de l’Italie (plus de gris foncés).

Au-delà des détails techniques expliqués plus haut quelles sont les caractéristiques de la maison florentine ?
Il faut savoir qu’Antonio a toujours le dernier mot. Il laisse le  client s’exprimer et proposer ce qu’il aime. Antonio fait mine d’être d’accordmais à la fin c’est toujours lui qui choisira. Toujours.  Bien entendu Antonio est habile. Il n’impose pas sa vision des choses. Il arrive à convaincre le client tout en douceur.

Et comme précisé plus haut, vous ne pouvez pas choisir votre tissu en mode « open bar ». Ce choix sera plutôt effectué en fonction de vos caractéristiques propres (la couleur de vos cheveux, de votre peaux, votre style général…) et de vos envies (uncostume en tweed par exemple) : ils vous proposeront alors 3-4 tissus qui vous correspondent.

Dernier point : le prix : ça reste très cher pour la plupart du commun des mortels mais dans la moyenne des prix que l’on trouve dans la Grande Mesure. Notons également que le mot cher reste relatif, surtout quand on sait que la construction d’une veste à la main peut nécessiter plus de 80 heures. Mais c’est un autre débat.
A noter également que les chemises ne sont pas fabriquées sur place (contrairement aux pantalons et vestes donc) mais dans un atelier à Naples.

POUR ALLER PLUS LOIN

Antonio raconte une anecdote sur un client qui, ayant déjà plusieurs tailleurs, voulait s’attacher ses services parce qu’il trouvait son travail plus classique (par opposition aux autres tailleurs plus modernes)
Antonio lui répond qu’il n’y a pas de costumes modernes ou classiques : ils créent du beau et tout le monde aime le beau. 

« noi facciamo il bello […] il bello piace a tutti »

La laideur se vend mal disait Raymond Loewy. Mais encore faudrait-il savoir ce qu’est le beau et comment on définit ce qui est beau ?
 Je ne veux pas faire de la philosophie de comptoir, mais le beau peut être compris au sens classique du terme (vision grecque) à savoir une harmonie des proportions. C’est un jugement quasi-scientifique. Parce que si je vous demande : qu’est ce qu’un beau vêtement ? Je sais déjà ce que vous allez me répondre : la matière, la coupe, les détails : en somme il y a des règles à respecter. Je suis plutôt d’accord. Mais je ne sais pas si la réponse est aussi simple.  On peut estimer que c’est un peu réducteur.
Antonio précise d’ailleurs bien que « tout le monde aime le beau ». Y compris donc ceux qui n’ont pas connaissance des règles à priori.
Il reprend ainsi une partie de la contradiction apparente formulée par Kant (antinomie du goût)  - oui oui vous êtes bien sur un blog de mode - :  à savoir qu’il existe un sens commun du beau (le beau est universel : tout le monde trouve beau - ou presque - la 9eme symphonie de Beethoven ou plus simplement un couché de soleil : pas besoin de l’expliquer ou de faire une démonstration mathématique)…mais en même temps le beau est subjectif et propre à chacun.
Ces questions sont épineuses mais cruciales. Et comme l’explique Luc Ferry dans son livre, le sens du Beau, j’ai un peu l’impression d’être moi aussi un de ces joueurs d’échec du jardin du Luxembourg qui rejoue sans cesse les mêmes parties alors que les meilleurs ont déjà trouvé ces combinaisons de coups depuis des décennies. Alors bien sûr, aucune théorie esthétique n’a réussie à être admise par unanimement par tous les philosophes comme étant vraie mais des avancées ont été faites en la matière et il serait dommage de ne pas en profiter.
D’ailleurs Luc,  si tu lis ses lignes (sait-on jamais, il suit bien assidûment Sex and the City) peux-tu nous aider à définir le beau ? La différence entre art et artisanat ? Entre beau et joli ? Le beau est-il intemporel ? Qu’est ce que le bon goût ?
Pour en finir avec les « A chacun son goût » / « Les goûts et les couleurs ce ne discute pas » / « l’idée du beau n’est que subjective ». Et surtout parce qu’en arrivant à discerner le beau du laid, les hommes choisiront toujours le beau.

Pour clore cette anecdote sur les costumes modernes et classiques, il faut tout de même savoir que les coupes des costumes Liverano ont été réactualisées. Elles sont plus étroites pour coller à l’air du temps. Donc oui leurs costumes sont beaux, mais non ils ne sont pas intemporels.
Cela tombe sous le sens, qui voudrait porter aujourd’hui les costumes d’il y a 50 ans ? Personne.
Les morphologies ont changées et les idées de ce que l’on se fait d’un costumeaussi.

Gary Grant – La mort au trousse

Gary Grant – La mort au trousse

Pour le reste je ne vous en dis pas plus. Il reste encore des pépites dans le film dont je n’ai pas parlé. (Et ca été dur de me retenir)
 A vous de le découvrir ;-)

En résumé
Le film/documentaire est très beau et permet d’aller plus loin dans la réflexion générale autour du vêtement. Comme O’mast, dans Antionio di Caolori, vous n’y apprendrez que peu de notions et techniques sur l’art de fabriquer un costumes. C’est d’avantage un film sur la vie d’Antonio.

Pour qui : les passionnés ET les autres aussi
Langues : version originale en Italien et sous-titré dans plusieurs langues : Anglais / Japonais / Italien / Chinois
Réalisateur : Gianlucca MIGLARIOTTI
Bande son : Jazz, jazz et jazz
En bonus du DVD vous recevrez un livret avec quelques photos et les remarques du réalisateur et des producteurs.

liverano liverano florence the armoury

Où se procurer le DVD : TheAmoury.com ou Drakes.com
Personnellement je l’ai acheté sur le site TheArmoury (Hong Kong): je n’ai eu aucun problème pour réceptionner le colis. Par contre il n’y avait pas de suivi de colis. (Pour les petits colis) Donc en cas de problème c’est peu pour votre pomme…Je vous conseille donc de l’acheter sur le site de Drakes. Ils sont positionnés en Angleterre. Et si vous êtes de passage à Londres c’est encore mieux.

Disponible également sur Itune sinon.