Patrick Johnson Tailor - Le sommet de la légèreté
Comme vous le savez, ça fait plus de 10 années maintenant que l'on s'intéresse aux vêtements masculins. Et forcément, plus le temps passe, plus il est difficile de s'émerveiller. Pourtant il existe quelques marques qui nous enthousiasme encore. Patrick Johnson Tailors en fait partie.
On a commencé à parler de cette marque dans cet article sur Londres. 10 années qu'on les suit. Et pour cause, ils réunissent tout ce qu'on aime : des vêtements légers, confortables, bien coupés, dans des matières peu courantes et vendus dans un cadre agréable.
Historique
Patrick Johnson, le fondateur éponyme Australien a d'abord fait des études d'œnologie à l'université d'Adélaïde dont il est sorti diplômé. S'en survivra une carrière autour du monde. Pour la petite anecdote, c'est sur les bancs de cette école qu'il rencontrera son bras droit actuel, Tom Riley.
Pourquoi l’œnologie ? Parce qu'en Australie méridionale, quand vous vous ne savez pas quoi faire, vous finissez souvent médecin, avocat ou vigneron.
Mais c'était avant de devenir allergique aux dioxyde de souffre, fréquemment utilisé dans la fabrication du vin (les fameux sulfites utilisés pour la conservation du vin). Patrick a même fait un séjour en France, la dernière chance qu'il s'est laissé, pour finalement se rendre compte que ce n'était pas fait pour lui. Une demi-déception, car ce n'était en fin de compte pas une vraie passion.
Quand on y pense, son métier d'oenologue n'est pas si éloigné de son travail actuel :
- contrôler le travail artisanal effectué dans leur usine de Carrare | contrôler la production de vins
- exercer quotidiennement son goût, trouver de beaux accords | déguster des vins
- vendre des costumes | commercialiser des vins
Il décide donc de se reconvertir dans un domaine qui le passionne depuis sa jeunesse : les vêtements. Son beau père n'y ait sûrement pas étranger. Il possédait un vestiaire bien fourni, notamment des costumes bespoke issu de Savile Row où il se rendait 3 fois par an.
Patrick décide de prendre la direction Londres (où son frère fait ses études à Cambridge) pour suivre les cours de la célèbre école de mode Central Saint Martins. Le tout en travaillant à côté pour pouvoir la financer. Et notamment pour Robert Emmett, un émigré australien qui a fondé une boutique de chemise sur-mesures. Il y a travaillé 7 ans en tant qu'apprenti et a notamment passé beaucoup de temps avec lui dans les ateliers de Naples ou de Parme.
L'ADN DE LA MARQUE
Tout a commencé en 2008. Après ses études en Angleterre, Patrick décide de retourner en Australie et adapte la confection de ses costumes au climat australien, à savoir relativement chaud ! Le bouche à oreille fonctionne. Des trunkshows se créent. Puis des showrooms ouvrent leurs portes : 2 à Sidney et 2 à Melbourne. L'entreprise grandit de manière organique. Et toujours sur leurs fonds propres. Aucun d'emprunt ni de levés de fonds.
En 2015, un showroom est ouvert à New York. S'en suivra un à Londres.
Le Design des showrooms est imaginé par la femme de Patrick : Tamsin Johnson. Une des architectes d'intérieurs les plus talentueuse d'Australie. Et pour avoir visité leur showroom londonien, je confirme. Ils sont aussi beaux en vrai qu'en photo.
Sa femme et lui aiment beaucoup l'art moderne. Cela se ressent donc dans leurs showroom mais aussi dans l'esthétique de leurs vêtements. Toujours très nets, sans fioritures.
Des inspirations que l'on peut également retrouver sur le compte instagram de leurs 2 marques (PJT & Suitshop).
Orienté peinture pour PJT avec des artistes célèbres -Henri Matisse, Cy Twombly, Pablo Picasso- à d'autres plus confidentiels - Etel Adnan, John Zabawa...-.
L'univers de Suitshop est plus ancré vers les designers et architectes modernes : Ludwig Mies van der Roh, Dieter Rams...
Instagram P.Johnson Tailors
Instagram SUITSHOP
Vous l'avez sans doute compris en lisant les paragraphes précédents, la philosophie de la marque est de proposer le meilleur du savoir faire traditionnel italien réactualisé au contexte moderne. L'idée est de concevoir des costumes aussi légers (les plus légers du monde !) et confortables que des pyjamas. Chose très difficile à trouver sur le marché actuel. Ils comblent un vide qui manquait cruellement.
Très franchement, cela fait d'eux l'une des plus belles marques du monde. Ils arrivent à innover tout en s'appuyant sur le savoir-faire existant.
Leur approche client également est très moderne et responsable. Aider les hommes à se créer un vestiaire cohérent, avec peu de pièces mais des vêtements durables et qui match tous ensemble. Consommer moins mais mieux. Et sur le long terme. Ne pas avoir 36 tailleurs, afin de pourvoir construire une relation et une réflexion sur le vestiaire de chaque client.
FABRICATION
Au commencement, en 2008, 3 types de confections étaient disponibles selon le niveau de finitions : Classique, Roma et Napoli. Les deux premiers étaient confectionnées en chine et la dernière option en Italie, à partir de 3500$ à l'époque.
A présent, c'est uniquement leur marque Suitshop qui fabrique en chine. Des costumes dans le même esprit à moins de 1000$ selon le tissu choisi. Avec la possibilité de recommander en ligne une fois votre patron défini.
Les produits de P.Johnson Tailors sont quant à eux uniquement fabriquées en Italie à la main depuis le rachat de l'entreprise Sartoria Carrara. Un petit atelier qui continue d'ailleurs de grandir, passant de 12 salariés à 50 il y a peu. Soit une grande partie des 82 employés de P.Johnson Tailors.
Question prix, les costumes P.Johnson démarrent à 1300€ et les pantalons à 300€. Toutes les retouches comprises. Des prix qui pour l'instant sont à peu près les mêmes depuis 10 ans même si aux Etats-Unis on leur a conseillé de les augmenter afin de ne pas être associé à une image trop "cheap".
Ils ne sont pas situés sur les avenues les plus chères et peuvent donc se permettent de mettre le maximum de valeur dans leur produits. (par exemple en utilisant des nouvelles matières, comme les tissus water repellent de chez Loro Piana). Mais oui la stratégie prix est réflexion complexe.
LIGNE DE PRÊT A PORTER
Au début de ce mois-ci une ligne de prêt-à-porter est sortie sur Mr Porter (et quelques mois auparavant au sein du célèbre grand magasin New-Yorkais Barneys) . Cependant 90% de leur production restera concentrée sur le sur-mesure.
Une collection qui s'est vendue comme des petites pains. Tout est déjà quasi sold out sur Mr Porter. Le premier designer australien sur ce mastodonte du e-commerce. La preuve également de l'intérêt des hommes pour les pièces légères et confortables.
Côté matières, des mélanges très légers mélanges en lin, coton, soie ou laine mérinos (en super 160' pour leur finesse)
Côté prix, ça commence à devenir assez cher, donc je vous conseille donc plutôt de vous tourner vers leur service sur-mesure, au même prix, ou parfois moins cher !
LOOKBOOK
Comme l'a dit le designer de Loewe, Jonathan Anderson dans cette interview de Business of Fashion, le pouvoir de l'image est tellement important. Et ça, P.Johnson semble l'avoir bien compris. Dès leurs début, la marque a toujours su innover en terme de communication. Surtout grâce à leurs lookbook dans l'air du temps. Par exemple en utilisant des masques de dessins animés, des couleurs primaires ultra pétantes en fond de photos ou des mannequins de sexe féminin.
Ou en rassemblant leurs équipes de tailleurs en studio.